Pendant l’isolement, comment avez-vous perçu et exprimé le sentiment de faire partie d’une communauté ?
J’ai vécu le début du confinement, en mars 2020, seule dans mon appartement à Montréal. Pendant ces premières semaines, le sentiment de faire partie d’une communauté dans cette ville, où je venais tout juste de déménager, m’échappait. J’éprouvais une nouvelle jalousie des couples, des colocataires, de tout ce monde qui me semblait un peu moins privé de compagnie (même si au moins, moi, j’ai ma chienne). Mais je me suis aussi vite déclarée chanceuse—avec plus de temps libre, sans avoir à voyager au bureau ou à l’école, j’ai recommencé à lire des romans, à jouer du piano, à faire du yoga—des activités que je comptais faire depuis des années, mais qui venaient toujours après les priorités sociales ou financières. Peu à peu, j’ai développé une nouvelle relation avec la solitude et avec moi-même et je la développe toujours, car nous n’avons pas encore terminé notre négociation. Au cours de ces longs mois de confinement, de déconfinement et de ré-confinement, j’ai aussi redécouvert les communautés dont je faisais déjà partie. D’abord, à travers les médias sociaux—des plateformes que j’avais auparavant plutôt évitées. Et puis, avec plus d’appels téléphoniques, de sessions de travail (peut-être avec une bière) par Zoom avec les amis, de concerts virtuels, de groupes de lecture, d’expositions d’art en ligne. Hors-ligne, il y avait les promenades (gardant deux mètres de distance) pendant la journée et les cartes postales envoyée autour du monde—des nouvelles méthodes d’établir des amitiés maintenant que les bars sont fermés. Récemment, par contre, je sens que nous sommes tous fatigués d’avoir à nous rejoindre en ligne et de loin. Après avoir éprouvé le premier choc de la pandémie tous ensemble, nous nous sommes petit à petit renfermés dans nos “bulles” locales et non sans complications.
Meilleur souvenir :
Au début de l’été 2020, j’ai passé six semaines de confinement à Victoria chez ma mère—un grand plaisir et, comme je me disais souvent, un grand privilège : pas tout le monde pouvait voyager si aisément pendant la pandémie. Tous les jours, je me suis promenée le long de la plage ; ensemble, nous avons joué aux cartes et terminé des puzzles interminables (malgré deux pièces manquantes). Le confinement à Victoria était un soulagement. Sans avoir à quitter la maison—même, pendant les premières deux semaines, sans pouvoir quitter la maison—j’ai appris comment mieux vivre à l’intérieur et redéfinir l’espace de mes possibilités et les possibilités de mon espace. Tous les jours, la session de yoga (maman dans sa chambre et moi dans la mienne, faisant des exercices différents en même temps) et puis le grand piano dans le salon. À l’automne, j’étais de retour à Montréal pour la rentrée (virtuelle) de l’école. Toujours aussi confinée qu’auparavant, je me sentais plus paisible et prête à être toute seule.